Brèves de jurisprudence du Conseil d’État
Avril - Juin 2025
Actes et décisions
1 – Détermination de l’autorité compétente pour décider – Changement - Effets.
Le changement des règles relatives à la détermination de l'autorité compétente pour édicter un acte réglementaire, ne saurait avoir pour effet de rendre illégal un acte qui avait été pris par une autorité qui avait compétence pour ce faire à la date de son édiction. Un tel changement a, en revanche, pour effet de faire cesser l'illégalité dont était entaché un règlement édicté par une autorité incompétente dans le cas où ce changement a conduit, à la date à laquelle le juge statue, à investir cette autorité de la compétence pour ce faire.
CE, 1ère, 25 mars 2025, M. A., n° 494983
2 – Suppression législative de l’interdiction faite aux organes délibérants des départements et des communes de prendre des vœux politiques – Effets.
Le CE retient que si la loi du 2 mars 1982 a supprimé l’interdiction faite aux communes et aux départements de prendre des vœux politiques et si elle ne leur reconnait, explicitement, que la possibilité d'émettre des vœux sur toutes les questions économiques et d'administration générale, le législateur doit être regardé comme ayant, implicitement mais nécessairement, reconnu la faculté, pour les organes délibérants des collectivités territoriales, de formuler des vœux, des prises de position ou des déclarations d'intention, y compris de nature politique, sans la restreindre aux domaines de compétence que la loi leur attribue, pourvu qu'ils portent sur des objets présentant un intérêt public local. Est donc sans effet, dans le cas d'un conseil départemental, la circonstance que l'article 94 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République ait limité la possibilité qu'il règle par ses délibérations les affaires du département aux seuls domaines de compétence que la loi lui attribue.
Solution plus généreuse que conforme à la volonté du législateur mais bien dans l’air du temps.
CE, 3è et 8è, 4 avril 2025, Département de la Seine-Saint-Denis, n° 472245
3 – Régime de communication de documents administratifs et de refus de communication.
Réitération d’une jurisprudence constante.
La personne qui demande la communication de documents administratifs en vertu des dispositions du code des relations entre le public et l'administration relatives au droit d'accès à ces documents n'a pas à justifier d'un intérêt à ce que les documents demandés lui soient communiqués ni, par suite, de son intérêt pour agir contre le refus de les communiquer.
CE, 10è, 10 avril 2025, Association Publicam Data, n° 494083
4 – Communication de documents administratifs – Date d’appréciation de leur caractère préparatoire ou non.
Rappel de ce que, pour déterminer si des documents administratifs dont la communication est demandée présentent ou non un caractère préparatoire, le juge doit se placer à la date à laquelle il statue non à la date de la décision.
CE, 10è, 10 avril 2025, Ville de Paris, n° 482531
5 – Droit public de l’agriculture – Dispositions non décisoires.
Ne constituent pas des dispositions normatives et ne sauraient fournir la base d’un recours contentieux ni les dispositions contenues dans l’article 31 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement car elles se bornent à fixer des objectifs généraux à l'action de l'Etat, ni celles figurant à l’art. L. 1 du code rural et de la pêche maritime parmi plus de vingt objectifs généraux assignés à la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation de la France, ni non plus les objectifs fixés dans des plans d'actions du Gouvernement, comme les plans ministériels de promotion de l'agriculture biologique " Horizon 2012 ", " Ambition Bio 2017 " et " Ambition Bio 2022 " ni, encore, L'objectif de conversion de 18 % de la surface agricole utile française en agriculture biologique d'ici 2027, fixé par le plan stratégique national de la politique agricole commune 2023-2027, qui ne constitue qu’un simple indicateur de performance, ni, enfin, la stratégie " De la ferme à la table " définie par la Commission européenne, qui fixe notamment pour objectif d'atteindre, dans l'ensemble de l'Union, 25 % de la surface agricole utile exploitée en agriculture biologique d'ici 2030.
CE, 3è et 8è, Association Maison de la Bio et autres, n°482402
6 – Droit public de l’agriculture – Maintien d’un régime d’autorisation préalable – Absence de caractère réglementaire.
L’arrêté ministériel qui se borne à rendre applicable à une région le régime d'autorisation préalable de conversion d'une prairie permanente en un autre couvert ne présente pas un caractère réglementaire. Mais, cet arrêté étant applicable à la fois dans les ressorts territoriaux des TA d’Amiens et de Lille, le recours contre cet acte doit être porté en première instance devant le TA de Paris.
CE, 3è et 8è, 05 juin 2025, Fédération régionale des syndicats d'exploitants agricoles des B. et le syndicat Jeunes agriculteurs A.-D., n° 477768
7 – Document administratif – Rapport au président de la république – Communicabilité.
Constituent des documents administratifs et sont donc communicables les rapports produits par les administrations dans le cadre de l'exercice de leur mission de service public (art. L. 300-2 code des relations du public avec les administrations), y compris les rapports élaborés à la demande du chef de l'État et qui lui sont adressés. Ainsi en va-t-il du rapport synthétisant les travaux du comité de suivi de la fermeture de la maternité de Creil, mis en place par la préfète de l'Oise, alors même que ce rapport a été élaboré à la demande du Président de la République.
CE, 10è et 9è, 18 avril 2025, ministre du travail, de la santé et des solidarités, n° 492337
8 – Conduite des relations internationales – Incompétence de la juridiction administrative.
Les conclusions de la requête de M. B. tendent à ce qu'il soit enjoint aux autorités françaises de dénoncer la méconnaissance de ses engagements par un autre État (les États-Unis) ou d'en exiger le respect tels que ceux-ci résultent, notamment, de la convention de La Haye du 25 octobre 1980 relative aux aspects civils de l'enlèvement international, elles concernent ainsi des actes qui ne sont pas détachables de la conduite des relations internationales de la France et soulèvent, par suite, des questions qui ne sont pas susceptibles, par leur nature, d'être portée devant la juridiction administrative.
CE, ord. référé, 28 avril 2025, M. B., n° 503672
9 – Mentions obligatoires devant figurer sur les décisions de l’administration – Titre exécutoire - Discordance.
La règle fixée par l’art. L. 212-1, alinéa 1, du code des relations entre le public et l'administration selon laquelle : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ", est applicable aux titres exécutoires, en l'absence de dispositions spéciales contraires.
Il suit de là, en premier lieu, lorsque la décision est signée par délégation, que ce sont les nom, prénom et qualité de la personne signataire qui doivent être mentionnés, y compris lorsque n'est notifiée à l'intéressé qu'une ampliation telle qu'un avis des sommes à payer.
Il suit encore de là que la discordance, ici, entre l’indication que l'ordonnateur de la créance était le directeur de l'ONIAM, alors qu'il résulte du titre exécutoire transmis au comptable qu'il a été signé, par délégation de ce directeur, par la directrice adjointe de l’ONIAM, entache d’illégalité ce titre exécutoire qui doit, en conséquence être annulé.
CE, 5è et 6è, 06 mai 2025, ONIAM, n° 473562 PEUT-ÊTRE À COMMENTER ??
Mêmes solutions in CE, 5è et 6è, 06 mai 2025, ONIAM, n° 474891
10 – Application du principe d’égalité entre demandeurs d’asile – Prise en charge des frais de transports pour certains déplacements.
Le fait de réserver, parmi les demandeurs d’asile bénéficiaires des conditions matérielles d'accueil, la prise en charge des frais de déplacement liés aux convocations à l'OFPRA et à la CNDA aux seuls demandeurs d'asile hébergés en centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA) et en hébergement d'urgence pour demandeurs d'asile (HUDA), alors qu'une telle orientation ne dépend pas de la situation ou du choix des intéressés mais procède du nombre de places disponibles dans un contexte de saturation du dispositif national d'accueil, constitue une différence de traitement sans rapport avec l'objet de l'accompagnement administratif dû aux demandeurs d'asile et porte une atteinte illégale au principe d'égalité.
CE, 2è et 7è, 06 mai 2025, GISTI et autres, n° 496436
11 – Droit de préemption urbain – Illégalité soulevée par voie d’exception – Absence de caractère réglementaire – Impossibilité d’invoquer la théorie de l’opération complexe.
Rappel d’une règle contentieuse constante, appliquée ici au droit de préemption urbain.
L'illégalité de l'acte instituant un droit de préemption urbain peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision de préemption. Toutefois, cet acte, qui se borne à rendre applicables dans la zone qu'il délimite les dispositions législatives et réglementaires régissant l'exercice de ce droit, sans comporter lui-même aucune disposition normative nouvelle, ne revêt pas un caractère réglementaire et ne forme pas avec les décisions individuelles de préemption prises dans la zone une opération administrative unique comportant un lien tel qu'un requérant serait encore recevable à invoquer par la voie de l'exception les illégalités qui l'affecteraient, alors qu'il aurait acquis un caractère définitif.
CE, 10è, 20 mai 2025, SCI Amna et M. B., n° 476252
Compétence judiciaire (voir aussi Procédure)
1 – Contentieux du versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi – Compétence du juge judiciaire.
Le contentieux du versement de l’allocation d’aide au retour à l’emploi relève de la compétence du juge judiciaire en vertu des dispositions de l'article L. 5312-12 du code du travail.
CE, 1ère, 11 avril 2025, Mme B., n° 495766
2 – Police de la conservation de la voirie routière – Compétence du juge judiciaire.
Rappel d’une solution constante.
Les mesures prises par le maire qui tendent à la répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier relèvent, conformément à l'article L. 116-1 du code de la voirie routière, de la seule compétence du juge judiciaire.
CE, 8è et 3è, 09 mai 2025, M. A. et Sté A., n° 489587
3 – Victimes d’actes de terrorisme – Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme (FGTI) – Litige relatif aux honoraires des médecins conseil des victimes – Compétence du juge judiciaire.
Les personnes victimes d'actes de terrorisme dont l'indemnisation est assurée par le FGTI, peuvent se faire assister en cas d'examen médical pratiqué à la demande du fonds par un médecin de leur choix et dont les honoraires sont susceptibles d'être pris en charge par celui-ci au titre du processus d'indemnisation visant à la réparation intégrale des dommages résultant d'une atteinte à la personne.
Le tribunal judiciaire de Paris est seul compétent pour connaître des demandes d'indemnisation des victimes dirigées contre le fonds.
Dans ces conditions les litiges relatifs aux honoraires des médecins conseil des victimes, en ce qu'ils ne sont pas dissociables des demandes formées par les victimes contre le fonds relatives à la reconnaissance de leur droit à indemnisation ou à l'offre d'indemnisation qui leur est faite, relèvent de la compétence de ce tribunal, que ces honoraires aient été réglés par les victimes ou directement par le FGTI à ces médecins.
T.C., 02 juin 2025, Société G. F., n° C4338, Publié au Recueil Lebon
4 – Concession funéraire – Destruction du monument la surmontant – Absence de voie de fait – Compétence du juge administratif.
Dans un litige en responsabilité dirigé contre une commune pour suppression des dalles de deux tombes funéraires, le TC décide que celui-ci relève du juge administratif car « Eu égard au caractère accessoire des monuments funéraires par rapport à la concession, seule l'extinction du droit réel immobilier tiré de la concession emporte compétence du juge judiciaire pour connaître de conclusions tendant à la réparation des dommages causés à une sépulture. »
Cette décision a le mérite de nous apprendre que la funeste voie de fait (la « folle du logis » pour parler comme René Chapus) n’est pas morte notamment dans les caveaux…
Elle a aussi le mérite – sans doute à son corps défendant – de montrer qu’il y a de l’humour dans les cimetères et l’on frémit de ce qu’il va se passer le jour où une commune détruira un caveau après en avoir détruit la dalle le recouvrant : les victimes du saccage auront besoin de dix ans de procédure pour saisir successivement le juge administratif du litige né de la démolition du monument et le juge judiciaire (juge « naturel » de la propriété privée » sic et youp !) de l’excavation du caveau constituant la concession. Il faut plaindre les futurs avocats ou notaires devant expliquer cela aux familles éplorées et les professeurs enseignant à leurs élèves une distinction aussi ébouriffante et échevelée ! Pierre Dac, au secours !...
T.C., 02 juin 2025, Mme I., Commune de Saint-Laurent sur Saône et ministre de l'intérieur, n° C4344, Publié au Recueil Lebon
Contrat
1 – Concession d’exploitation du Stade de France – Questions diverses.
Cette décision est très importante par le nombre et la diversité des thèmes qu’elle aborde dans le cadre d’un recours en annulation de la procédure de passation du contrat de concession portant sur l'exploitation du Stade de France (étendue et portée du contrôle exercé par le juge du référé précontractuel, questions susceptibles, ou non, d’examen par le juge de cassation, analyse des candidatures, définition de ses besoins par l'autorité concédante, critères d'appréciation des offres, appréciation de la méconnaissance éventuelle des principes d'égalité et d'impartialité de la procédure, procédure de négociation des offres, durée de la concession, etc.). Cependant sa longueur empêche son analyse dans le cadre de nos rencontres trimestrielles.
CE, 7è et 2è, Société Consortium Stade de France, n° 501427
2 – Recours des tiers contre les clauses d’un contrat administratif – Distinction entre clauses réglementaires et clauses non réglementaires – Cas des concessions autoroutières.
En premier lieu, indépendamment du recours de pleine juridiction dont disposent les tiers à un contrat administratif pour en contester la validité, un tiers à un contrat est recevable à demander, par la voie du recours pour excès de pouvoir, l'annulation des clauses réglementaires contenues dans un contrat administratif qui portent une atteinte directe et certaine à ses intérêts.
En deuxième lieu, dans le cas d’une concession autoroutière, sont des clauses réglementaires celles qui définissent l'objet de la concession et les règles de desserte, ainsi que celles qui définissent les conditions d'utilisation des ouvrages et fixent les tarifs des péages applicables sur le réseau concédé. N’en sont pas, les stipulations relatives notamment au régime financier de la concession ou à la réalisation des ouvrages, qu'il s'agisse de leurs caractéristiques, de leur tracé, ou des modalités de cette réalisation, lesquelles n’ont qu’un caractère purement contractuel.
En troisième lieu, il se déduit de ce qui précède que la clause fixant la durée d'une concession autoroutière et les conditions d'une résiliation par le concédant, qui n'a pour objet que d'organiser les relations entre le concédant et le concessionnaire et de participer à la détermination du régime financier de la concession, est dépourvue de caractère réglementaire.
Irrecevabilité d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre une telle clause.
CE, 7è et 2è, 10 juin 2025, associations Agir pour l'environnement, ATTAC Tarn et les Vallons, n° 495479
Voir aussi, même solution : CE, 7è, 19 juin 2025, Association de concertation et de proposition pour l'aménagement et les transports (ACPAT), n° 499680
3 – Contrat entre personnes privées – Contrat comportant la signature par l’État - Clause contractuelle attribuant compétence aux juridictions administratives - Compétence du juge judiciaire.
Rappel, d’abord, qu’ « un contrat qui ne prévoit d'obligations qu'entre personnes privées revêt, en principe, un caractère de contrat de droit privé. »
En l’espèce une convention d'occupation temporaire, fixe les conditions dans lesquelles la société Ideal hôtel met à disposition de l'association Centre d'action sociale protestant et sous sa seule responsabilité, des locaux que l'association s'est engagée à occuper pour l'hébergement et l'accueil temporaire des personnes ou des ménages en situation de rue, jusqu'au départ progressif des personnes accueillies.
Ce contrat, qui se borne à indiquer qu'une convention de financement liant l'État et l'association sera établie afin de définir les modalités de financement durant le temps de mobilisation des locaux, ne prévoit d'obligations qu'entre la société Ideal hôtel et l'association Centre d'action sociale protestant, qui sont des personnes privées, sans donner le caractère d'un contrat administratif à la convention d'occupation temporaire qui les lie, quand bien même le contrat et l'avenant en cause ont été signés par le représentant de l'État.
Comme l'État ne contrôle pas l'organisation ou le fonctionnement de l'association ni ne lui procure l'essentiel de ses ressources et que l'association n'a pas agi au nom et pour le compte de l'État mais en son nom et pour son propre compte, il s’ensuit que l'action de la société Ideal hôtel dirigée contre l'association Centre d'action sociale protestant relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, nonobstant la clause contractuelle attributive de compétence à la juridiction administrative.
T.C., 02 juin 2025, Association Centre d'action sociale protestant, n° C4340
Cette décision s’insère dans un courant, aujourd’hui puissant, qui tend à réduire au strict minimum le champ de la compétence du juge administratif en définissant et en délimitant de façon étroite d’importantes catégories juridiques comme le contrat, le domaine public ou les deniers publics par exemple.
On en a une bonne illustration avec une autre décision du même jour de ce Tribunal qui juge que ne constituent pas des marchés soumis au code des marchés publics (exit ici le code de la commande publique) des conventions par lesquelles une commune acquiert des objets mobiliers en vue de leur exposition dans les musées communaux au double motif que:
1° l’achat « d'œuvres et d'objets d'art existants, d'objets d'antiquité et de collection » relève de l’exception à l’applicabilité du code des marchés publics prévue par l’art. 3 de ce code ;
2° « la circonstance que les objets faisant l'objet de ces conventions soient destinés aux collections des musées de la ville ne suffit pas à faire regarder ces dernières comme ayant pour objet l'exécution même du service public dont les musées (...) ont la charge ou y faisant participer M. C. (i.e. le vendeur. »
T.C., 02 juin 2025, M. C., n° C4342
Domaine
1 – Conclusion ou cessation d’une convention relative au domaine privé des personnes publiques – Recours des tiers – Compétence du juge administratif.
Normalement, seul le juge judiciaire est compétent pour connaître de la contestation par une personne privée de la délibération par laquelle une personne morale de droit public, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle, quelle qu'en soit la forme, dont l'objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n'affecte ni son périmètre ni sa consistance. Toutefois, seule la juridiction administrative est compétente pour connaître de la demande formée par un tiers tendant à l'annulation de l'acte autorisant la conclusion d'une convention ayant cet objet, comme de l'acte refusant de mettre fin à une telle convention. Il en va de même s’agissant de la contestation par l'intéressé de l'acte par lequel une personne morale de droit public refuse d'engager avec lui une relation contractuelle ayant un tel objet.
(Réitération de la solution retenue par TC, 4 décembre 2023, Association intercommunale de chasse agréée de Fosse-vira c/ ONF, C4294, Rec. Lebon p. 535)
Peut-être pourrait-on essayer de simplifier une solution qui, pour justifiée qu’elle soit au plan théorique, tue sa logique par sa complexité ?
TC, 7 avril 2025, Association Protection des territoires gâtinais (Pro.T.G), C4331
2 – Domaine public – Notion – Régime applicable.
Rappel – encore une fois – que les biens faisant partie du domaine public avant l’entrée en vigueur le 1er juillet 2006 du CGPPP en vertu des critères alors applicables n’ont pas cessé d’en faire partie malgré la modification de ces critères à partir de cette date.
CE, 8è et 3è, 20 mai 2025, Société La panacée des plantes, n° 476252
Droit de l’Union européenne
1 – Mesures nationales d’urgence – Information de la Commission européenne – Absence d’action de celle-ci – Retour à la compétence des seules autorités nationales.
À l’occasion d’un recours tendant à l'abrogation des dispositions du décret du 16 décembre 2020 fixant la liste des substances actives de la famille des néonicotinoïdes ou présentant des modes d'action identiques à ceux de ces substances interdites en application de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, le juge se prononce sur le les conséquences du silence de la Commission européenne lorsqu’elle est informée de la prise de mesures nationales d’urgence. Il est jugé qu’il résulte des dispositions des art. 69 et 71 du règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009, que si, à la suite de l'information officielle d'un État membre de la nécessité de prendre des mesures d'urgence visant à interdire l'utilisation d'un produit ou d'une substance active, la Commission européenne s'abstient de prendre de telles mesures, l'État membre peut prendre des mesures conservatoires provisoires jusqu'à l'adoption de mesures communautaires. Tant qu'aucune décision n'a été adoptée à cet égard au niveau de l'Union, il appartient au juge national, juge de droit commun de l'application du droit de l'Union européenne, d'apprécier la légalité de ces mesures et de leur maintien au regard des conditions de fond et de procédure prévues par ces mêmes dispositions.
La solution, qui est de pur bon sens, doit être approuvée.
CE, 3è et 8è, 05 juin 2025, Syndicat professionnel Phyteis, n° 488338
2 – Autoroutes – Augmentation tarifaire accordée par l’État – Absence de caractère d’aide d’État prohibée.
La clause tarifaire litigieuse, qui ne prévoit aucun dispositif de compensation financière de la société ASF par l'État, est relative à des péages acquittés par les usagers d'autoroutes, elle ne peut être regardée comme une aide accordée par l'État ou au moyen de ressources d'État au sens des stipulations de l'article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Par conséquent, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la clause tarifaire litigieuse serait constitutive d'une aide d'État irrégulière en l'absence de notification à la Commission européenne.
CE, 7è et 2è, 05 juin 2025, Mme A. et autres, n° 492192
3 – Retrait du Royaume-Uni de l’UE – Absence d’effets sur les procédures administratives en cours -Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF).
Sans surprise car très logique est la solution jugeant que la circonstance que l'accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord de l'Union européenne et de la Communauté européenne de l'énergie atomique du 17 octobre 2019 ne comporterait aucune disposition, au titre des procédures administratives en cours, en vue de prévoir que les autorités d'un Etat membre demeurent compétentes à l'égard d'un ressortissant du Royaume-Uni pour des faits commis avant le retrait de cet Etat de l'Union européenne, est sans incidence sur la compétence de la commission des sanctions de l'AMF, que cet accord n'a eu ni pour objet ni pour effet de réglementer.
CE, 6è et 5è, 13 juin 2025, société H2O AM LLP, n° 471548 et M. D. et M. F., n° 471744 (jonction)
Droit du travail
1 – Salarié protégé – Application d’un accord de performance collective modificatif du contrat de travail – Cas de l’inaptitude du salarié.
Combinant certaines dispositions du code du travail avec le principe général du droit de protection des salariés investis de certaines missions de défense et de représentation des autres salariés, le CE décide :
1°/ que l'acceptation par un salarié protégé de la modification de son contrat de travail résultant de l'application d'un accord de performance collective, dont les stipulations se substituent de plein droit aux clauses contraires et incompatibles de son contrat de travail (cf. le III de l'art. L. 2254-2 du code du travail), n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de son obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ce salarié (cf. art. L. 4121-1, L. 4624-3 et L. 4624-6 c. trav.) et, à cet égard, notamment, de prendre en considération l'avis et les indications ou les propositions le cas échéant émis par le médecin du travail relativement à ce salarié.
2°/ si, en cas de refus par un salarié protégé de la modification de son contrat de travail résultant de l'application d'un accord de performance collective, son employeur peut, pour ce seul motif, engager une procédure de licenciement (cf. art. L. 2254-2 c. trav.), et, à ce titre, s'agissant d'un salarié protégé, demander à l'inspecteur du travail l'autorisation de procéder à un tel licenciement, ce dernier ne peut légalement faire droit à une telle demande si à la date à laquelle il se prononce, le salarié a fait l'objet d'un avis d'inaptitude émis par le médecin du travail, son licenciement, en un tel cas, ne pouvant en principe avoir d'autre fondement que l'inaptitude et étant, par suite, régi par les dispositions des articles L. 1226-10 du code du travail et suivants.
CE, 4è et 1ère, 4 avril 2025, M. B., n° 471490
2 – Salarié protégé – Rupture conventionnelle – Vérification de la réalité du consentement du salarié.
Dans un litige né d’une rupture conventionnelle entre une entreprise et l’une de ses salariées, ayant la qualité de salariée protégée, le juge rappelle d’abord l’obligation pour l’inspection du travail de vérifier qu'aucune circonstance, en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par le salarié ou avec son appartenance syndicale, n'a été de nature à vicier son consentement. Ensuite, et surtout, il ajoute cette importante précision, que retient aussi la Cour de cassation (Soc. 23 janvier 2019, n° 17-21.550), « L'existence de faits de harcèlement moral ou de discrimination syndicale, commis par l'employeur au préjudice du salarié protégé, n'est, par elle-même, pas de nature à faire obstacle à ce que l'inspection du travail autorise une rupture conventionnelle, sauf à ce que ces faits aient, en l'espèce, vicié le consentement du salarié. »
CE, 4è et 1ère, 16 mai 2025, Sté Koch et associés, n° 470005 et n° 493143 (2 espèces)
3 – Licenciement d’un candidat aux fonctions de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique – Régime issu des ordonnances de septembre et décembre 2017.
Depuis la réforme des institutions représentatives du personnel dans l'entreprise par les ordonnances du 22 septembre et du 20 décembre 2017 prises en application de l'article 2 de la loi du 15 septembre 2017, aucune de leurs dispositions, ni aucune autre du code du travail, ne prévoit désormais que le licenciement envisagé par l'employeur des salariés candidats aux fonctions de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique, soit précédé de la consultation de ce comité qui existait jusqu’à cette date.
CE, 4è et 1ère, 16 mai 2025, Sté Senerval, n° 498924
4 – Avenant à un accord collectif de travail – Extension – Condition de clarté garantissant sa sécurité juridique – Absence.
C’est sans appliquer inexactement la loi que la ministre du travail refuse l’extension de l’ avenant n° 33 - relatif à la classification et à la rémunération des emplois -, à la convention collective nationale de l'hospitalisation privée étendue, au motif que l'équivocité de ses stipulations qui, en raison de l'incidence de la revalorisation des rémunérations prévue par l'avenant sur l'évolution de la masse salariale des employeurs relevant de son champ d'application, ne sauraient être distraites de l'accord sans en modifier l'économie générale, fait naître une ambiguïté quant à son applicabilité aux salariés et aux employeurs compris dans son champ d'application.
CE, 4è et 1ère, 13 juin 2025, Fédération nationale des syndicats CFDT des services de santé et des services sociaux et autres, n° 497325
Fonction publique
1 – Enseignant handicapé - Demande d’allègement de service – Non consultation du supérieur hiérarchique – Annulation
Avant de se prononcer sur la demande de M. A. tendant à l'aménagement de son poste de travail par l'allègement de sa quotité de service, le directeur académique des services de l'éducation nationale n'a pas recueilli l'avis du supérieur hiérarchique de l'intéressé, en méconnaissance des dispositions de l'art. R. 911-16 du code de l'éducation. Eu égard à la finalité de cet avis, la seule transmission de la demande sous couvert du supérieur hiérarchique n'a pu pallier l'absence de cet avis, absence qui a été de nature à influer sur le sens de la décision (Annulation).
CE, 7è, 10 avril 2025, M. A., n° 491272
2 – Radiation des cadres pour abandon de poste – Effet et portée.
Un agent administratif hospitalier obtient l’annulation d’une décision de mutation et demande sa réintégration dans le poste précédemment occupé. Réponse négative du Conseil d’État dans la mesure où cet agent, entre la date de la décision de mutation et celle de son annulation, a fait l’objet d’une radiation des cadres pour abandon de poste, ce qui en lui faisant perdre sa qualité d’agent public, fait obstacle à sa réintégration dans les fonctions qu’il occupait au moment de la décision de mutation litigieuse.
CE, 5è, 23 mai 2025, M. A., n° 475179
3 – Conclusion de contrats successifs à durée déterminée dans l’enseignement supérieur – Durée supérieure à six ans – Conséquences.
Rejetant le pourvoi dont l’avait saisi l’Universités de Nantes, le CE estime que c’est sans erreur de droit que la CAA de Nantes a jugé que le contrat d'engagement conclu sur le fondement de l’article L. 954-3 pour la période comprise entre le 1er novembre 2017 et le 31 août 2018, conduisant à ce que l'intéressée justifie d'une durée de services publics de six ans dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique auprès du même établissement public, était réputé être conclu à durée indéterminée et qu’elle a annulé pour ce motif les décisions du président de l'université de Nantes refusant de requalifier ce contrat en contrat à durée indéterminée et de renouveler son dernier contrat.
CE, 7è et 2è, Nantes Université, 05 juin 2025, n° 491913
Hiérarchie des normes
1 – Changement de législation pour l’avenir – Sort de la réglementation prise en application de la législation antérieure.
Lorsqu'une loi nouvelle, tout en modifiant pour l'avenir l'état du droit, laisse subsister la réglementation antérieure, édictée dans les formes prévues par la loi antérieure, cette règlementation demeure jusqu'à ce qu'une réglementation intervenue dans les formes prévues par la loi nouvelle en ait abrogé les dispositions.
05 juin 2025, , n° 500720fondée à soutenir qu’un arrêté interministériel pris en 1954 en application d’une loi du 4 avril 1953 serait devenu illégal du fait de l'incompétence négative dont serait entaché l'article R. 423-5 du code de l'aviation civile au regard du renvoi désormais effectué par l'article L. 6523-3 du code des transports, dès lors que l'arrêté est antérieur à cet article R. 423-5 et n'a donc pas été pris pour son application ou sur son fondement.
CE, 2è et 7è, 28 mai 2025, X. et autres c/ Sté Volotea, n° 498865
Libertés
1 – Procédure de taxation d’office – Respect du secret professionnel de l’avocat.
Bien que la procédure de taxation d’office ne soit pas contradictoire en raison du comportement du contribuable, l’administration fiscale entache la procédure d'imposition d'irrégularité, d'une part, en sollicitant et obtenant, en violation du secret professionnel de l'avocat, des documents couverts par ce secret, ainsi qu'en faisant état de ces documents dans la notification qui lui a été adressée en application de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales et, d'autre part, en s'abstenant de lui communiquer, ou en lui communiquant tardivement, en méconnaissance de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, des documents qui pouvaient être utiles à l'exercice des droits de la défense. L’arrêt d’appel ayant jugé régulière cette façon de procéder est cassé.
CE, 8è et 3è, 20 mai 2025, Mme B., n° 475782
2 – Obligation d’user du français dans les délibérations des assemblées locales – Cas de la collectivité de Corse – Pourvoi non admis et QPC rejetée.
Pourvoi contre un arrêt de la CAA de Marseille, confirmant un jugement du TA de Bastia, sur déféré préfectoral, annulant une délibération de l’Assemblée de Corse décidant que « les membres du Conseil exécutif de Corse et les agents du Secrétariat général du Conseil exécutif utilisent les langues corse et française dans leurs échanges oraux, électroniques, et dans les actes résultant de leurs travaux ». Non admission du pourvoi
Rejet de la QPC en ce que les conditions d’une telle question ne sont pas remplies, l’obligation d’usage du français découlant directement de l’art. 2 de la Constitution, s’impose aux personnes morales de droit public et aux personnes morales de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public et implique que les particuliers ne peuvent se prévaloir, dans leurs relations avec l'administration et les services publics, d'un droit d'usage d'une langue autre que le français, ni être contraints à un tel usage.
CE, 3è et 8è, Collectivité de Corse, n° 500720
3 – Gens du voyage – Liberté de stationnement.
Commet une erreur de droit l’arrêté préfectoral décidant inapplicable à des personnes de nationalité roumaine et d'origine rom la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage alors qu’entrent dans son champ d'application les personnes dites « gens du voyage », quelle que soit leur origine, dont l'habitat est constitué de résidences mobiles et qui ont choisi un mode de vie itinérant.
CE, 5è et 6è, 06 juin 2025, Mme A., n° 486577
Police
1 – Retrait de permis de conduire par constatation d’un solde de points nul – Preuve insuffisante.
Un automobiliste se voit retirer son permis pour solde de points nul et conteste ces décisions au motif que si les amendes forfaitaires majorées correspondant aux infractions des 18 avril et 17 mai 2022 ont bien fait l'objet d'un règlement partiel, les mentions " AOB " et " AOE " figurant sur les bordereaux de situation produits par l'administration établissent que ce règlement est intervenu à la suite, respectivement, d'une opposition administrative bancaire et d'une opposition administrative employeur. Il suit de là qu'ainsi que le soutenait le requérant, ces paiements, résultant de recouvrements forcés, ne sont pas de nature à établir qu'il a bien reçu les avis de paiement correspondant ni que l'administration s'est bien acquittée à son égard, préalablement au paiement, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route.
Sont annulées les deux décisions de constat d’une somme nulle de points et de retrait de permis de conduire.
CE, 5è, 07 mai 2025, M. B., n° 499674
2 – Police des étrangers – Délivrance des titres de séjour – Éléments d’état-civil non probants – Effets.
Saisi d’une demande d’avis de droit, le CE répond ceci.
Si le préfet peut rejeter une demande de titre de séjour au motif que l'identité du demandeur n'est pas établie, l'absence de caractère probant des documents d’état-civil produits par l'intéressé ne permet toutefois pas nécessairement, à elle seule, de regarder son identité comme non établie.
Il appartient au juge de l’excès de pouvoir, en cas de contestation de ce motif, de décider si
l'identité de l'intéressé ne peut effectivement être regardée comme établie.
Lorsque l’intéressé conteste par la voie de l’excès de pouvoir le rejet préfectoral d’un titre de séjour
fondé sur le seul motif que l'identité du demandeur n'est pas établie, ce dernier ne peut utilement soulever des moyens de légalité interne sans rapport avec la teneur du rejet, tels la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du CESEDA, des stipulations de l'article 8 de la convention EDH ou des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant.
CE, Avis, 2è et 7è, 12 juin 2025, M. B., n° 501325
Procédure contentieuse
1 – Intérêt à contester un jugement ou à y former tierce opposition – Appréciation par rapport au seul dispositif du jugement attaqué.
Rappel (CE, Section, 17 juillet 2009, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie c/ Becker, n° 288559, p. 283), qui ne va cependant pas de soi, que l'intérêt à contester une décision juridictionnelle, ou à former tierce opposition, s'apprécie par rapport au dispositif de la décision juridictionnelle critiquée.
Or, si, quels qu'en soient les motifs, une décision de rejet ne fait pas grief au défendeur, qui n'est donc pas recevable à la déférer au juge d'appel ou de cassation, il en va différemment d'une décision qui rejette les conclusions du demandeur comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître, laquelle, sans clore le litige, invite le demandeur à le poursuivre devant l'autre ordre de juridiction.
Il en va de même d’une décision juridictionnelle qui rejette une demande au motif que la juridiction judiciaire est seule compétente pour en connaître car elle est de nature à préjudicier aux droits du défendeur qui n'a pas été appelé en la cause, lequel est dès lors recevable à former tierce opposition contre cette décision.
Commet donc une erreur de droit l’arrêt d’appel qui juge qu’un établissement des eaux et de l'assainissement ne pouvait se prévaloir d'aucun droit lésé par l'ordonnance ayant rejeté comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître la demande d'annulation formée par l’asssociation syndicale libre d’un lotissement contre le titre exécutoire émis par cet établissement et qu’il n'était en conséquence pas recevable à attaquer cette ordonnance par la voie de la tierce opposition, alors que l'établissement des eaux et de l'assainissement, émetteur du titre contesté, n'avait pas été appelé en la cause.
CE, 3è-8è réunies, 21 mars 2025, Établissement des eaux et de l'assainissement de Saint-Martin (EEASM) c/ association syndicale libre (ASL) du lotissement « Les Résidences de la Baie Orientale », n° 469818
2 – Exception d’illégalité – Régime de l’exception dirigée contre un acte non réglementaire en l’absence d’opération complexe.
Le juge rappelle ici, en premier lieu, que l’illégalité d'un acte administratif, réglementaire ou non, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. Il indique aussi, en second lieu, que dans le cas d'un acte non réglementaire, l'exception d'illégalité n'est en outre recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte.
Au cas d’espèce, il est jugé que l'arrêté déclarant d'utilité publique un projet de canalisation de transport d'hydrocarbures et celui autorisant la construction et l'exploitation de cette canalisation, n’ont ni l’un ni l’autre un caractère réglementaire. Ils étaient devenus définitifs à l'égard des tiers antérieurement, à la date à laquelle la requérante a, pour la première fois, excipé de leur illégalité devant le tribunal administratif. Par ailleurs, ils ne formaient pas entre eux une opération complexe, d’où la forclusion encourue et opposée.
CE, 6è-5è réunies, 25 mars 2025, Mme B., n° 485420
Voir aussi, jugeant que c’est sans erreur de droit qu’une CAA estime que le programme pluriannuel d'intervention approuvé par les agences de l'eau, qui doit seulement être compatible avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux, n'est pas pris pour l'application de ce dernier, qui ne constitue pas davantage sa base légale, et en déduit que les moyens tirés de l'illégalité, par voie d'exception, du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux étaient inopérants à l'encontre de la délibération en litige.
CE, 6è-5è réunies, 25 mars 2025, Fédération française des associations de sauvegarde des moulins et autres, n° 487831
3 – Intérêts moratoires et capitalisation des intérêts – Application des articles 1231-6 et 1343-2 nouveaux du Code civil.
Réitérant sa jurisprudence antérieure, le CE applique directement en matière administrative les nouveaux articles du Code civil régissant les intérêts des sommes dues qui se sont substitués aux anciens art. 1153 et 1154 du Code. Il juge : « 3. Une créance détenue sur l'administration existe, en principe, à la date à laquelle se produit le fait qui en est la cause, sans qu'il soit besoin que le juge se livre au préalable à une appréciation des faits de l'espèce et en liquide le montant. Saisie d'une demande tendant au paiement de cette créance, l'administration est tenue d'y faire droit dès lors que celle-ci est fondée. En conséquence, les intérêts moratoires courent, lorsqu'ils ont été demandés, à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l'administration ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine.
4. Il résulte de ces principes que lorsque le juge alloue un capital à une victime en réparation des préjudices ayant résulté pour elle d'une prise en charge médicale fautive, les intérêts moratoires courent sur ce capital à compter du jour où la demande d'indemnisation au principal est parvenue à l'administration, pour l'ensemble des chefs de préjudice dont le fait générateur est antérieur à cette demande, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que, pour certains d'entre eux, des dépenses aient été exposées par la victime postérieurement à cette demande préalable d'indemnisation. En revanche, lorsqu'un préjudice naît postérieurement à la demande initiale, les intérêts sur la somme correspondante courent à compter de la date à laquelle l'indemnisation de ce préjudice est demandée. Les intérêts ainsi alloués portent eux-mêmes intérêts à condition qu'au moins une année d'intérêts soit due à la date à laquelle la capitalisation est demandée. »
CE, 5ème, 4 avril 2025, Centre hospitalier de Falaise et Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), n° 466556
4 – Prononcé d’un désistement d’office (art. R. 612-5-1 CJA) – Usage abusif.
On trouvera dans cette décision un bon exemple d’annulation d’une ordonnance de désistement d’office en raison de l’usage abusif de ce pouvoir.
CE, 5è, 4 avril 2025, M. B., n° 496465
5 – Arrêté préfectoral liquidant une astreinte ordonnée par la chambre correctionnelle d’une cour d’appel pour infraction à la législation applicable au permis de construire – Compétence du juge judiciaire.
Une cour d’appel a condamné un particulier, pour exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, au paiement d'une amende de 5 000 euros et ordonné " la mise en conformité " des lieux ou des ouvrages dans un délai de six mois, sous astreinte de 50 euros par jour de retard. Il est jugé que l’arrêté préfectoral liquidant l’astreinte et ayant donné lieu à l’émission d’un titre de perception étant relative à l'exécution d'une décision judiciaire, le contentieux de son recouvrement relève de la juridiction judiciaire sans que la circonstance qu'il a été procédé à cette liquidation par décision du préfet, ainsi que le prévoit l'article L. 480-8 du code de l’urbanisme, n'ait pu modifier ni la nature du litige ni la détermination de la compétence juridictionnelle.
TC, 7 avril 2025, M. B. c/ Préfet de la Haute-Corse, C4335, Publiée au Recueil Lebon
6 – Signature de la minute d’un jugement – Magistrat statuant seul – Signature obligatoire du greffier d’audience – Absence – Annulation.
Devant les tribunaux administratifs, la minute de la décision jugée par un magistrat statuant seul, doit être signée par ce magistrat et par le greffier d'audience. En l’absence de la signature de la greffière d'audience, le jugement est annulé.
CE, 10è, 10 avril 2025, M. et Mme C., n° 491288
7 – Application Télérecours – Communication trop tardive de mémoires en défense.
Les communications les jeudi 4 janvier 2024 et le vendredi 5 janvier 2024 de deux premiers mémoires en défense détaillés en vue d’une audience enrôlée pour le lundi 8 janvier étaient trop tardives. Annulation du jugement subséquent.
CE, 1ère, 11 avril 2025, M. A., n° 492214
8 – Prévention d’actes de terrorisme – Invocation au soutien de la demande de soustraction de certaines pièces ou informations au débat contradictoire devant le juge administratif – Renvoi d’une QPC.
Est jugée sérieuse et de nature à être renvoyée au Conseil constitutionnel, la question de savoir si ne portent pas une atteinte disproportionnée aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au principe du respect des droits de la défense, les dispositions du II de l'article L. 773-11 du code de justice administrative, en ce qu’il institue une procédure permettant à l'administration de communiquer au juge, saisi de la légalité d'une mesure administrative fondée sur des motifs en lien avec la prévention d'actes de terrorisme, des informations ou éléments qui ne seront pas soumis au débat contradictoire, permettant ainsi au juge administratif de fonder sa décision sur des informations communiquées par l'administration dont l'existence même n'a pas été portée à la connaissance de l'autre partie.
CE, 10è et 9è, M. A., n° 501551
9 – Récusation des juges.
« La circonstance qu'un magistrat ait précédemment rejeté une requête d'un requérant ne saurait, à elle seule, être de nature à mettre en doute son impartialité pour juger d'autres requêtes de ce même requérant et n'est, par suite, pas un motif de nature à justifier une demande de récusation. »
Solution évidente.
CE, 2è, 30 avril 2025, M. A., n° 502219
10 – Aide juridictionnelle – Partie perdante – Honoraires de l’avocat.
Il se déduit des dispositions combinées de l’art. L. 761-1 du CJA et des articles 37, 43 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de condamner à son profit la partie perdante qu'au paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat. En revanche, l'avocat de ce bénéficiaire peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
CE, 6è, 02 mai 2025, Mme A., n° 493096
11 – Envoi en recommandé et charge de la preuve du contenu de l’envoi.
Un tribunal administratif avait jugé que la demande présentée par la société requérante était irrecevable faute pour elle d'établir, par la seule production d'un récépissé d'envoi d'un courrier à l'administration fiscale, lui avoir adressé la réclamation préalable prévue à l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales.
Le CE prononce, à juste titre, l’annulation de ce jugement en retenant qu’alors qu'aucun élément ne tendait à montrer que le pli en cause ne contenait pas la réclamation préalable, par ailleurs produite devant le tribunal, et eu égard à la concordance des dates figurant sur le récépissé d'envoi et cette réclamation, le tribunal a méconnu les règles relatives à l'attribution de la charge de la preuve et dénaturé les pièces du dossier.
CE, 9è, 06 mai 2025, Sté Sofijar, n° 493488
12 – Règle générale de procédure applicable sans texte – Juridiction disciplinaire – Pouvoirs du juge d’appel en l’absence d’appel de la personne sanctionnée.
Rappelant la « règle générale de procédure » selon laquelle l'appel ne peut préjudicier à l'appelant (solution constante au moins depuis CE, 19 février 1964, Plainemaison, Rec. Lebon p. 117), le Conseil d’État, dans un cas où l’appel d’une décision disciplinaire pour sévérité insuffisante n’avait pas été interjeté par le praticien sanctionné, juge que la juridiction disciplinaire d'un ordre professionnel, saisie, en appel, d'un seul recours aux fins d'aggravation de la sanction infligée à un professionnel en première instance, ne peut relaxer ce dernier ou lui infliger une sanction moins sévère que celle prononcée par les premiers juges. Il en va ainsi y compris si la juridiction d'appel estime qu'aucun manquement ne peut être reproché à la personne poursuivie. En ce cas, il lui appartient seulement de rejeter la requête d'appel dont elle est saisie.
Ceci n’est que l’application de l’interdiction pour le juge administratif de statuer ultra petita.
CE, 4è et 1ère, 16 mai 2025, M. A. et Syndicat des orthodontistes de France, n° 470567
13 – Obligation du ministère d’avocat devant le Conseil d’État.
La présentation sans avocat de requêtes non dispensées de ce ministère entache celles-ci d’irrecevabilité dès lors que cette dernière était expressément invoquée en défense par le ministre des finances.
CE, 9è et 10è, 19 mai 2025, Conseil de surveillance du fonds commun de placement d'entreprise « EDF Transitoire », n° 489531
14 – Portée probatoire des constats d’huissier.
Hors la matière pénale, les constatations d'un huissier ne font foi, (en vertu des dispositions de l’art. 1er de l’ordonnance du 2 novembre 1945 dans la version que lui ont donnée les art. 24 et 25 de l’ordonnance du 2 juin 2016), que jusqu'à preuve du contraire, et non jusqu'à inscription de faux. En jugeant le contraire, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a commis une erreur de droit.
CE, 4è, 22 mai 2025, M. A., n° 493359
15 – Note en délibéré émanant de certaines parties défenderesses – Inapplicabilité du principe du contradictoire.
Dans un litige où trois parties étaient défenderesses, deux d’entre elles déposent une note en délibéré dont il est reproché au tribunal de ne l’avoir pas communiquée à ses déposants et au troisième défendeur.
Il est jugé qu’à la supposer établie, la circonstance que le tribunal administratif se serait fondé sur la note en délibéré produite par Mme B... et la société Scalottas, qu'il n'a pas communiquée, n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à leur égard ni à l'égard de la commune, qui était, comme eux, partie en défense dans l'instance devant le tribunal administratif. Elle ne peut donc pas être utilement invoquée, ni par celle-ci, ni par eux-mêmes.
Si la solution est évidente et imparable envers ceux qui ont adressé la note, en revanche on ne voit pas pourquoi le troisième défendeur pourrait être légalement tenu dans l’ignorance de l’existence et du contenu de cette note sans que soit affecté le principe du contradictoire.
CE, 10è, 20 mai 2025, Commune de Courchevel, n° 492631, Mme B. et Sté Scalottas, n° 492631
16 – Jugement n’ayant pas eu besoin de statuer sur les fins de non-recevoir – Obligation du juge d’appel de ce jugement.
Le juge d'appel, auquel est déféré un jugement ayant rejeté au fond des conclusions sans que le juge de première instance ait eu besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées devant lui, ne peut faire droit à ces conclusions qu'après avoir écarté expressément ces fins de non-recevoir, alors même que le défendeur, sans pour autant les abandonner, ne les aurait pas reprises en appel.
Application stricte – mais traditionnelle - du principe de l’effet dévolutif de l’appel.
CE, 5è et 6è, 06 juin 2025, Syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé 4 place du Calvaire et autres, n° 475175
17 – Invitation à produire un mémoire « dans les meilleurs délais » - Portée.
La mention, contenue dans un courrier communiquant un mémoire d'une partie, invitant l'autre partie à produire, le cas échéant, un mémoire en réplique « dans les meilleurs délais », n'a pas pour effet de reporter la date de clôture de l'instruction.
CE, 7è, 06 juin 2025, M. B., n° 491790
18 – Double degré de juridiction – Absence de consécration.
Rappel que ni l'article 16 de la Déclaration de 1789, ni les stipulations de l'article 13 de la convention EDH, ni celles de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ni aucun principe ne consacrent l'existence d'une règle du double degré de juridiction qui interdirait au pouvoir réglementaire de prévoir des cas dans lesquels les jugements sont rendus en premier et dernier ressort. Par suite, ne saurait être invoqué en cette hypothèse le droit d'exercer un recours effectif.
CE, 2è et 7è, 12 juin 2025, GISTI et autres, n° 497930
19 – Juridictions disciplinaires – Prise de parole en dernier par la personne poursuivie – Preuve du respect de ce principe général du droit.
Si les principes généraux du droit disciplinaire impliquent que, lors de l'audience, la personne poursuivie soit mise à même de prendre la parole en dernier, aucune des dispositions du code de la sécurité sociale
non plus qu'aucune autre disposition ni aucun principe ne font obligation à la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des médecins de mentionner dans sa décision que la faculté offerte au praticien poursuivi de prendre la parole en dernier lui a été rappelée lors de l'audience. Par suite, la seule absence d'une telle mention dans sa décision ne permet pas de présumer que celle-ci a été rendue de manière irrégulière faute pour le praticien mis en cause d'avoir eu la possibilité de prendre la parole en dernier.
En revanche, si la juridiction du contrôle technique, ainsi qu'il lui est loisible de le faire, fait figurer une telle mention dans sa décision, cette dernière fait foi jusqu'à preuve du contraire.
CE, 4è et 1ère, 13 juin 2025, n° 494132
Procédure administrative non contentieuse
1 – Nouveau retour sur le droit de se taire – Durcissement du Conseil d’État ?
Dans la saga sur le « droit de se taire », on relèvera cette décision jugeant qu’il n’y a pas lieu à renvoyer au Conseil constitutionnel la QPC tirée de ce que porterait atteinte au droit de ne pas s'incriminer soi-même résultant de l'article 9 de la déclaration de 1789, l'absence d’obligation pour les membres ou agents de la CNIL procédant à des opérations d'enquête et de contrôle d'aviser préalablement les gestionnaires de traitement de données à caractère personnel ou leurs représentants de leur droit de garder le silence lors de leur déroulement. Le CE estime que les dispositions de l’art. 19 de la loi Informatique et Libertés n'ont pas pour objet le recueil, par les enquêteurs de la CNIL, des explications d'une personne portant sur des faits pour lesquels elle serait mise en cause dans le cadre d'une procédure tendant à l'adoption de mesures de sanction à son encontre. Elles n'impliquent donc pas par elles-mêmes que les personnes sollicitées se voient notifier leur droit de se taire. Le distinguo nous semble davantage tiré par les cheveux que juridiquement fondé.
CE, 10è et 9è, Société Criteo, n° 482872
2 – Droit de se taire.
Encore une décision sur ce thème dans un contexte particulier qui justifie sa mention aux Tables du Recueil Lebon.
Le juge apporte deux précisions importantes.
1°/ Le droit de se taire s'applique non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. Ainsi, l'usager d'une université faisant l'objet de poursuites disciplinaires ne peut être entendu sur les agissements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire. A ce titre, il doit être avisé, avant d'être entendu pour la première fois, qu'il dispose de ce droit pour l'ensemble de la procédure disciplinaire.
2°/ Sauf détournement de procédure, le droit de se taire ne s'applique ni aux échanges ordinaires de l'usager avec les agents de l'université, ni aux enquêtes diligentées par le chef de l'établissement, quand bien même ceux-ci sont susceptibles de révéler des faits commis par l'usager de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire. Dans le cas où l'usager d'une université, ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire selon la procédure prévue au code de l'éducation, n'a pas été informé du droit qu'il avait de se taire alors que cette information était requise, cette irrégularité n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la sanction prononcée que lorsque, eu égard à la teneur des déclarations de l'usager et aux autres éléments fondant la sanction, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l'intéressé n'avait pas été informé de ce droit.
CE, 4è et 1ère, 09 mai 2025, Mme Gandon, n° 499277
3 – Droit de se taire – Étendue en présence d’une constatation des faits par le juge pénal.
Poursuivant son offensive en faveur du droit de se taire, le CE juge « que le médecin poursuivi devant la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins doit être informé du droit qu'il a de se taire (…), les circonstances que la matérialité des faits reprochés a été constatée par le juge pénal et que devant ce dernier, le médecin a été informé du droit qu'il avait de se taire étant sans incidence à cet égard. »
CE, 4è, 22 mai 2025, M. A., n° 494096
4 – Droit de se taire – QPC.
Renvoi au C.C. de la QPC portant sur le point de savoir si les dispositions de l'article 22 de la loi du 6 janvier 1978, relatives à l'exercice du pouvoir de sanction de la CNIL, porteraient atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution en tant que l'obligation pour une autorité administrative indépendante investie d'un pouvoir de sanction d'informer les personnes poursuivies de leur droit de garder le silence s'applique aux personnes morales et, dans l'affirmative, selon quelles modalités.
CE, 10è et 9è, 05 juin 2025, Société Cosmospace et société Télémaque, n° 499596
5 – Protection du contribuable contre les changements de doctrine de l’administration fiscale – Mécanisme de l’art. L. 80 A du LPF – Portée.
L'article L. 80 A du livre des procédures fiscales institue un mécanisme de garantie au profit du redevable qui, s'il l'invoque, est fondé à se prévaloir, à condition d'en respecter les termes, de l'interprétation de la loi formellement admise par l'administration, même lorsque cette interprétation ajoute à la loi ou la contredit.
Selon le CE, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu, dans un objectif de sécurité juridique, prémunir le contribuable contre les changements de doctrine de l'administration alors qu'il aurait appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que celle-ci avait alors formellement admise. En revanche, il n'a pas entendu, par ces dispositions, permettre à un contribuable qui n'a pas lui-même fait application de la loi fiscale selon l'interprétation qu'en donnait l'administration par des instructions ou circulaires publiées, de se prévaloir de cette interprétation pour demander la réduction d'une imposition établie, sur la base de sa déclaration, conformément à la loi fiscale. La différence de traitement ainsi instituée est justifiée par une différence de situation en rapport direct avec l'objet des dispositions en cause, qui visent uniquement à prémunir les contribuables contre des rehaussements d'imposition résultant d'un changement de doctrine de l'administration et n'ont pas pour objet ni ne sauraient avoir pour effet de conférer à l'administration un pouvoir normatif en matière fiscale que la Constitution a confié au seul législateur.
Par suite, la société Habitat des Hauts-de-France n'est pas fondée à soutenir que les dispositions contestées méconnaitraient le principe d'égalité devant la loi.
CE, 8è et 3è, 05 mai 2025, société Habitat des Hauts-de-France, n° 499387
6 – Point de départ du délai de prescription quadriennale.
Rappel d’une jurisprudence constante et claire en matière de dommage corporel.
Quel que soit le régime de responsabilité applicable, le point de départ du délai de prescription quadriennale applicable à une action en responsabilité en vue d'obtenir réparation pour la victime d'un dommage corporel qu'elle a subi est le premier jour de l'année suivant celle de la consolidation des infirmités liées à ce dommage.
CE, 5è, 07 mai 2025, M. A., n° 496311
7 – Application de la jurisprudence Préfet de l’Eure.
Rappel qu’une personne publique « est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle a le pouvoir de prendre. ». Et rappel aussi « lorsque la créance trouve son origine dans un contrat, (que) la faculté d'émettre un titre exécutoire dont dispose une personne publique ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge administratif d'une demande tendant à son recouvrement, notamment dans le cadre d'un référé-provision » sauf si elle a émis un tel titre exécutoire avant la saisine du juge.
CE, 8è et 3è, 20 mai 2025, Société La Forge de Longuyon, n° 498461
Question prioritaire de constitutionnalité
1 – QPC dans le cadre d’une question préjudicielle du juge judiciaire au juge administratif
Il résulte des dispositions de l'article 61-1 de la Constitution et des dispositions organiques relatives à la question prioritaire de constitutionnalité qu’une telle question peut être soulevée devant le juge administratif lorsqu'il est saisi, sur renvoi de l'autorité judiciaire, de la question de la légalité d'un acte administratif. Le juge administratif apprécie alors la condition d'applicabilité au litige du régime de la QPC au regard du litige en appréciation de légalité dont il est ainsi saisi.
CE, 1è et 4è, 9 avril 2025, Mme B. c/ CPAM des Alpes-de-Haute-Provence, n° 496122
Recours
1 – Action en reconnaissance de droits - Notion et régime.
Une action en reconnaissance de droits (art. L. 77-12-1 et s., CJA) peut être engagée devant le juge administratif, par une association ou un syndicat professionnel satisfaisant aux conditions prévues par la loi, afin que soit reconnu, à un groupe indéterminé de personnes placées dans une situation juridique identique et partageant le même intérêt, le bénéfice de droits individuels résultant de l'application de la loi ou du règlement. A ce titre, la contrariété d'une disposition législative à la Constitution, pour autant qu'une question prioritaire de constitutionnalité soit soulevée, ou aux stipulations d'un traité ou accord international, entrées en vigueur dans l'ordre juridique interne et invocables devant le juge administratif, ou encore au droit de l'Union européenne, de même que l'illégalité d'une disposition règlementaire peuvent être utilement invoquées à l'appui d'une telle action, sous réserve que la disposition législative ou règlementaire en cause constitue la base légale de la décision de rejet opposée par l'autorité compétente à la réclamation préalable formée par l'association ou le syndicat professionnel demandeur à l'action. Si le juge administratif fait droit à cette action, il lui appartient, en application des dispositions de l'article L. 77-12-3 du code de justice administrative, dans les limites de sa compétence, de déterminer les conditions de droit et de fait auxquelles est subordonnée la reconnaissance des droits ainsi accordée. A cet égard, s'il apparaît au juge administratif que les effets de cette reconnaissance sont de nature à emporter des conséquences manifestement excessives pour les divers intérêts publics ou privés en présence, il lui revient - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties - de déterminer les conditions et les limites dans lesquelles les droits individuels revendiqués sont susceptibles d'être remis en cause.
Nous attirons l’attention des lecteurs sur l’importance de cette décision de principe relative à une procédure méconnue et conséquemment, trop peu utilisée.
CE, 4è et 1ère, 06 mai 2025, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, n° 491616
Référé
1 – Référé liberté – Non-respect du délai de 48h pour statuer – Absence de dessaisissement du juge – Absence de nullité de la procédure.
Le délai de quarante-huit heures dans lequel le juge des référés doit se prononcer lorsqu'il est saisi en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'est pas imparti à peine de dessaisissement du juge ou de nullité de la décision rendue. Il en résulte que l'absence de réponse de la part du juge des référés du tribunal administratif de Paris quant à la requête de M. B. n'a pas eu pour effet de clore cette instance et, par suite, que cette circonstance n'a pas pour effet de saisir d'office le juge des référés du Conseil d'État des conclusions de cette requête.
CE, ord. réf., 02 mai 2025, M. B., n° 503817
2 – Recours en cassation – Ordonnance de référé entièrement exécutée – Recours devenu sans objet.
Rappel, à nouveau, ce la règle de procédure de bon sens selon laquelle lorsque, postérieurement à l'introduction d'un recours en cassation dirigé contre une ordonnance du juge des référés saisi sur le fondement de l'art. L. 521-1 du CJA d'une demande de suspension d'une décision administrative, cette décision, qu'elle ait ou non fait l'objet d'une suspension par le juge des référés, a été entièrement exécutée, ce recours devient sans objet.
Passé le saint, passée la fête…
CE, 2è, 15 mai 2025, M. A., n° 499843
3 – Référé suspension – Présomption d’urgence - Privation de la totalité du traitement excédant un mois.
Rappel d’une solution jurisprudentielle particulièrement innovante selon laquelle une mesure prise à l'égard d'un agent public ayant pour effet de le priver de la totalité de sa rémunération doit, en principe, être regardée, dès lors que la durée de cette privation excède un mois, comme portant une atteinte grave et immédiate à la situation de cet agent, de sorte que la condition d'urgence doit être regardée comme remplie, sauf dans le cas où son employeur justifie de circonstances particulières tenant aux ressources de l'agent, aux nécessités du service ou à un autre intérêt public, qu'il appartient au juge des référés de prendre en considération en procédant à une appréciation globale des circonstances de l'espèce.
CE, ord. réf., 28 mai 2025, M. B., n° 503475
Responsabilité
1 – Responsabilité d’une société d’avocats – Avocats aux Conseils – Régime.
Dans un litige en réparation du préjudice qu’aurait subi le client d’une société d’avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation par suite de fautes commises dans la gestion du dossier qu’il lui a confié, le Conseil d’État juge, très classiquement, que pour apprécier si l'avocat a commis une faute, il y a lieu de déterminer s'il a normalement accompli, avec les diligences suffisantes, les devoirs de sa charge, à la condition que son client l'ait mis en mesure de le faire. Il appartient notamment à l'avocat de recueillir auprès de ses clients l'ensemble des éléments d'information et les documents propres à lui permettre d'assurer, au mieux, la défense de leurs intérêts. Pour l'appréciation de la responsabilité de l'avocat, il y a lieu de tenir compte, le cas échéant, du comportement du client et de ses autres conseils. Dans le cas où il y aurait eu négligence, il y a lieu de déterminer si cette négligence, en privant le client d'une chance sérieuse de succès du recours, a été de nature à lui porter un préjudice de nature à lui ouvrir droit à réparation.
CE, 6è, 02 mai 2025, M. B. c/ société cabinet Rousseau, Tapie, n° 494471
2 – Liaison du contentieux - Demande indemnitaire en réparation de préjudices – Invocation d’un fait générateur – Effets sur les chefs de préjudice non invoqués – Expiration du délai de recours contentieux.
Le CE rappelle à nouveau que, normalement, la décision par laquelle l'administration rejette une réclamation tendant à la réparation des conséquences dommageables d'un fait qui lui est imputé lie le contentieux indemnitaire à l'égard du demandeur pour l'ensemble des dommages causés par ce fait générateur, quels que soient les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages invoqués par la victime et que sa réclamation ait ou non spécifié les chefs de préjudice en question.
Il résulte donc de cette position de principe que la victime est recevable à demander au juge, dans les deux mois suivant la notification de la décision ayant rejeté sa réclamation, la condamnation de l'administration à l'indemniser de tout dommage ayant résulté de ce fait générateur, y compris en invoquant des chefs de préjudice qui n'étaient pas mentionnés dans sa réclamation.
Toutefois, si après expiration de ce délai de deux mois, la victime saisit le juge d'une demande indemnitaire portant sur la réparation de dommages causés par le même fait générateur, cette demande est tardive et, par suite, irrecevable. Il en va ainsi alors même que ce recours indemnitaire indiquerait pour la première fois les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages, ou invoquerait d'autres chefs de préjudice, ou aurait été précédé d'une nouvelle décision administrative de rejet à la suite d'une nouvelle réclamation portant sur les conséquences de ce même fait générateur.
Enfin, il ne peut être fait exception à ce qui précède que dans le cas où la victime demande réparation de dommages qui, tout en étant causés par le même fait générateur, sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement à la décision administrative ayant rejeté sa réclamation. Et le juge ajoute cette précision qui se veut simplificatrice en décidant que, dans ce dernier cas, qu'il s'agisse de dommages relevant de chefs de préjudice figurant déjà dans cette réclamation ou de dommages relevant de chefs de préjudice nouveaux, la victime peut saisir l'administration d'une nouvelle réclamation portant sur ces nouveaux éléments et, en cas de refus, introduire un recours indemnitaire dans les deux mois suivant la notification de ce refus.
Il faut saluer la clarté de cette solution jurisprudentielle et sa forte vertu pédagogique – une sorte de vade-mecum - qui, en même temps, est d’une grande importance pratique.
CE, 5è et 6è, 06 mai 2025, M. D. et autres, n° 469068
3 – Actes d’administration judiciaire – Nécessité d’une faute lourde.
Il résulte des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives que les justiciables auxquels des décisions d'administration judiciaire prises en matière d'aide juridictionnelle ont causé un préjudice peuvent en obtenir réparation en cas de faute lourde.
C’est là une innovation jurisprudentielle dont on regrettera l’absence de motivation sous prétexte qu’il s’agirait là d’un principe général du droit. C’est bin la première que le degré de gravité de la faute dommageable pour obtenir réparation est censé résulter d’un principe général du droit.
CE, 6è et 5è, 07 mai 2025, M. B., n° 489396
4 – Responsabilité pour risque – Accident ou maladie imputable au service – Conditions de réparation du préjudice.
Commet une erreur de droit la CAA qui juge que la fonctionnaire invoquant une responsabilité pour risque et non une responsabilité pour faute doit établir un lien de causalité direct et certain entre le service et la maladie dont elle a souffert, et non le lien seulement direct exigé pour que soit reconnue l'imputabilité de cette maladie au service. En effet, l'indemnisation, sur le fondement de la responsabilité sans faute, des préjudices subis du fait d'une maladie reconnue imputable au service, - contrairement à ce qu’a jugé la Cour - n'implique pas de nouvelle appréciation du lien entre la maladie et le service, mais seulement celle du caractère certain des préjudices invoqués et du lien direct entre ceux-ci et la maladie reconnue imputable au service.
CE, 3è et 8è, 05 juin 2025, Mme C., n° 472198
Sport
1 – Fédération française de rugby (FFR) – Injonction d’abroger certaines dispositions de ses règlements généraux – Inexécution – Injonction sous astreinte de le faire sous deux mois.
La FFR n'a pas procédé à l'abrogation des dispositions de l'article 222-2, repris dans ses règlements généraux pour la saison 2024-2025 adoptés le 8 juillet 2024, en tant qu'elles imposent aux licenciés non-inscrits sur la liste des sportifs de haut-niveau la souscription d'une assurance couvrant les dommages corporels auxquels leur pratique sportive peut les exposer. Il en résulte qu'à la date de la présente décision, la FFR n'a pas pris les mesures propres à assurer l'exécution de la décision du Conseil d'État du 27 juin 2024. La FFR ne peut à cet égard utilement soutenir que l'exécution de la décision est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives, notamment en affectant gravement le modèle assurantiel qu'elle a mis en place et, par voie de conséquence, ses finances.
La FFR est enjointe de procéder sous deux mois à l’abrogation ordonnée, sous astreinte de 500 euros par jour de retard après expiration du délai d’un mois.
CE, 2ème, 19 juin 2025, M. A., n° 499701
Urbanisme et permis de construire
1 – Sursis à statuer sur une demande de permis de construire – Prévisions du PLU.
Un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire sur le fondement de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution.
Est donc illégale l’opposition d’un sursis à statuer à la demande d’autorisation du projet litigieux dès lors qu’il n’est pas possible d'identifier en quoi sa réalisation aurait été de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal.
CE, 5è et 6è, 14 avril 2025, Commune de Vernouillet, n° 468502
2 – Révision générale du PLU d’une commune – Illégalité des conclusions du commissaire enquêteur – Appréciation et effets.
Dans le cadre de la révision du PLU d’Antibes, le commissaire enquêteur avait, au terme de son enquête, refusé de se prononcer sur les observations du public portant sur l'orientation d'aménagement et de programmation relative au secteur des Quatre Chemins, qui représentaient une part importante de l'ensemble des observations exprimées au cours de l'enquête publique, au motif qu'une procédure contentieuse était en cours devant le tribunal administratif de Nice à l'encontre d'une précédente délibération du conseil municipal de la commune approuvant la mise en comptabilité du plan local d'urbanisme avec une opération d'aménagement projetée dans ce quartier.
L’arrêt de la CAA qui, tout en relevant ce refus, a néanmoins jugé que le commissaire enquêteur avait rendu ses conclusions motivées conformément aux exigences de l'article R. 123-19 du code de l'environnement est annulé pour erreur de droit.
Le CE estime ce vice régularisable, le TA étant invité à désigner un nouveau commissaire enquêteur qui, sans recommencer l’enquête, sera chargé, sur la base des éléments déjà recueillis, de rédiger un rapport en conséquence.
On dira notre accord avec ces deux solutions.
CE, 1ère et 4è, 30 avril 2025, M. et Mme K. et autres, n° 490965
3 – Urbanisme et aménagement commercial – Recours impossible contre un avis de la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC).
Rappel d’une règle bien connue en dépit de la complexité des textes applicables.
Lorsqu'un projet soumis à autorisation d'exploitation commerciale en vertu des dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce doit également faire l'objet d'un permis de construire, seul ce permis, ou la décision refusant de le délivrer, peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. A cet égard, une décision implicite de rejet d'un tel permis est susceptible de naître, comme le prévoient les dispositions figurant au h) de l'article R*. 424-2 du code de l'urbanisme, à l'expiration du délai d'instruction, en cas d'avis défavorable de la commission départementale d'aménagement commercial sur le fondement de l'article L. 752-4 du code de commerce ou, le cas échéant, de la CNAC.
Ainsi, en l’espèce, une cour d’appel ne commet pas d'erreur de droit en jugeant que la « décision » par laquelle la CNAC s'était défavorablement prononcée sur le projet présenté par la société Lidl constituait un avis et qu'il était insusceptible de recours contentieux, seule pouvant en l'espèce être déférée au juge administratif une décision de refus de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale.
CE, 4è et 1ère, 16 mai 2025, Sté Lidl, n° 470005
4 – Certificat d’urbanisme – Portée et effets.
Rappel de deux aspects souvent oubliés par les décideurs publics en droit de l’urbanisme.
En premier lieu, les dispositions de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ont pour effet de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d'urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire, déposée durant les dix-huit mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique.
En second lieu, ces mêmes dispositions législatives n'ont ni pour objet ni pour effet de priver le détenteur de ce certificat du droit d'obtenir un permis de construire lorsque son projet est conforme aux règles d'urbanisme applicables à la date de la décision prise sur sa demande ou, si le projet n'est pas conforme, à celles de ces règles qui n'ont pas pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique ou à une partie divisible d'entre elles, lorsqu'il l'est aux règles de même objet applicables à la date du certificat d'urbanisme.
CE, 1ère et 4è, Mme A., n° 491748